La raison est la capacité de l’homme à rationaliser, c’est-à-dire à réfléchir sur un phénomène afin de le rendre compréhensible et explicable. L’étymologie de « raison » est ratio = le calcul. D’emblée, on comprend que la raison a une dimension logique, mathématique.

Pour Descartes, l’homme possède la raison et c’est ce qui le distingue des animaux, tout en établissant sa supériorité. Les animaux, en effet, se distinguent par leur corporalité et ont un fonctionnement similaire aux machines : ils n’agissent pas grâce à leur réflexion, mais par instinct, comme s’ils étaient programmés. C’est la théorie de l’animal-machine. Au contraire, l’homme témoigne de son intelligence grâce à la parole, qui prouve qu’il dispose de la raison. La raison est donc le propre de l’homme pour Descartes.

La raison est aussi le propre de l’homme quand il s’agit de qualifier quelqu’un de raisonnable : c’est-à-dire, de doté de raison, responsable, lucide. Il est courant d’entendre des expressions comme « sois raisonnable », « tu n’es pas raisonnable ! ».

Ce qui caractérise quelqu’un de raisonnable, c’est le fait qu’il respecte la morale. C’est également ce que souligne Descartes. C’est aussi le fait qu’il fasse preuve de mesure, de contrôle de lui.

Mais l’homme peut également perdre la raison, c’est-à-dire basculer dans la folie, en utilisant son intelligence au service de buts immoraux. C’est par exemple dans cette perspective que s’inscrivent la construction des camps de concentration et d’extermination, ainsi que leurs différents systèmes de mise à mort massive.

Aristote : la raison doit répondre à certains critères qui lui permettent d’emblée de rejeter ce qui est incohérent, erroné, irrationnel. Ces critères sont le principe d’identité, de non-contradiction et de tiers exclu : une chose ne peut pas être autre chose à la fois, une chose ne peut pas posséder deux caractéristiques contraires qui se contredisent, et une chose et son contraire ne peuvent pas être vraies ou fausses en même temps. Par exemple, un homme ne peut pas être un loup, et un homme ne peut pas être petit et grand à la fois : « Il est impossible qu’un même attribut appartienne et n’appartienne pas en même temps et sous le même rapport à une même chose ».

Descartes : la raison est la faculté de l’esprit à discerner le vrai du faux. Conduire sa raison nécessite une méthode (Discours de la méthode), c’est-à-dire un cheminement qui suit un certain nombre d’étapes logiques et de règles pour arriver à un résultat. Descartes veut éradiquer toutes ses anciennes opinions non fondées, non certaines. Seule la raison peut conduire la science vers la vérité alors il faut rejeter tout fondement incertain de la connaissance, toute opinion qui va contre la vérité. C’est pourquoi il faut douter de toute opinion et de toute incertitude : c’est le doute méthodique.

Kant : la raison ne doit pas s’appuyer sur des préjugés, qui sont des croyances communes non prouvées. Elle doit faire l’effort de se confronter à ce qu’elle veut étudier, à ce qu’elle veut comprendre, même si c’est difficile. Se conformer aux préjugés est une preuve de passivité de l’esprit, qui est contre la condition humaine : l’homme est un être raisonnable.

Pascal : « La dernière démarche de la raison est de reconnaître qu’il y a une infinité de choses qui la surpassent. » L’aboutissement de la raison, sa plus haute forme, consiste à reconnaître ses limites. Elle ne peut pas tout connaître, même si paradoxalement elle le voudrait et tente de le faire, elle doit rester modeste et ne pas céder aux pulsions d’orgueil.

Kant : la raison se contredit quand elle veut connaître ce qui la dépasse. On peut penser au-delà de l’expérience, mais on ne peut pas connaître ce qui se passe au-delà de l’expérience. Ce ne sont que des hypothèses ou des croyances. « La raison humaine a cette destinée particulière d’être accablée de questions qu’elle ne peut écarter ; car elles lui sont proposées par la nature de la raison elle-même, mais elle ne peut non plus y répondre, car elles dépassent tout pouvoir de la nature humaine. »

Pascal : en plus de son incapacité à tout connaitre, la raison a une limite : sa faiblesse face à la puissance de l’imagination. En effet, elle fait de l’homme un être fort, puissant, courageux, conscient, mais si ce dernier s’imagine quelque chose, la raison ne pourra lutter : c’est la peur, l’horreur qui l’emportent. Par exemple, Pascal évoque le plus grand philosophe du monde, qui se retrouverait sur des planches assez larges pour être assuré de ne pas tomber. Mais si sous ses planches, se trouve un précipice, il va se laisser emporter par son imagination, qui va lui faire penser qu’il va tomber et mourir. Là réside la faiblesse de la raison face à l’imagination.